lundi 11 octobre 2010

2e volet : Chapitre 2: Latour, prends garde !

Chapitre 2 : Latour, prends garde !

Nicolas de Latour, PDG de Standard and Riches, venait de passer une très mauvaise journée. Celui qui passait, par ses fonctions, pour l’un des hommes les plus puissants du monde, avait l’impression que les choses étaient en train de lui échapper.
Standard and Riches était la plus connue et la plus redoutable des agences de notation financière. Ses experts, après toutes sortes de calculs, d’audits et d’obscurs marchandages, distribuaient aux quatre coins du globe les bons et les mauvais points. Les entreprises cotées en bourse, les Etats endettés émetteurs de bons et d’obligations garantis, tous tremblaient devant le verdict impitoyable de Standard and Riches, qui donnait le ton à ses pareilles pour faire grimper ou chuter les actions de telle ou telle société, tout comme les taux d’intérêts frappant les émetteurs de dette publique.
La récente crise financière avait failli mettre à mal cette dictature des experts. Des journalistes courageux, des économistes indépendants avaient réussi à mettre en lumière les responsabilités de Standard and Riches dans la bulle spéculative monstrueuse qui s’était gonflée sur la base de valeurs pourries aux subprimes. Les agences de notation, si sérieuses et rigoureuses, n’avaient rien trouvé à redire aux produits financiers véreux émis par les banques. Bien au contraire, les bonnes notes tombaient sur ces fruits blets comme les confiseries à Noël. « Achetez, achetez, spéculateurs du Monde entier, la fortune est au coin de la rue ! Garanti sur facture ! »
Et ce fut le Krach. Le pire depuis 1929. Chose bizarre, les fonds gérés directement par les agences de notation avaient échappé au massacre. Les subprimes avaient été revendus juste à temps à divers gogos, et le gros du pognon placé dans des valeurs sûres : les matières premières ou les armes, par exemple. Au soupçon d’incompétence s’ajoutait celui de la malhonnêteté. Mais Nicolas de Latour et ses pairs avaient de la ressource autant que des relations.
Pour éviter une catastrophe générale, les Etats touchés par la crise avaient dû soutenir les banques menacées d’effondrement et injecter de l’argent public dans leurs économies flageolantes. La dette publique enfla d’autant, et il fallait éviter que les taux de remboursement des emprunts souscrits sur les marchés ne grimpent trop haut. Et qui notait les Etats, les faisant sautiller sur leurs pattes arrière comme des toutous pour obtenir le fameux AAA, la meilleure note ? Les agences de notation, Standard and Riches en tête.
Les courageux journalistes et les économistes indépendants en furent pour leur grogne, les banques pourries réengraissées aux frais du contribuable, et les Etats sommés de faire de drastiques économies budgétaires pour éponger leur dette.
Nicolas de Latour et sa clique avaient gagné sur toute la ligne. Le capitalisme financier avait repris sa ronde infernale comme le drogué reprend son fix après deux jours d’abstinence.
Mais ce jour-là, tandis qu’un soir neigeux tombait sur Manhattan, Nicolas de Latour faisait la tronche derrière l’immense baie vitrée de son bureau, à cent mètres au-dessus des rues grouillantes de New York. Les façades illuminées des buildings se découpaient sur un ciel gris foncé, leur reflet brouillé par les flocons fondus qui criblaient la vitre teintée.
Dans le grand bureau tout en boiseries précieuses, les écrans plasma qui recouvraient l’un des murs déversaient des flots d’images silencieuses venues des principales chaînes d’infos continues du monde entier. CNN. China News. Bloomberg TV. CTI. Et même Ecuador TV Color. Toutes ou presque évoquaient les évènements politiques français, les bandeaux du bas de l’écran étant là pour rappeler qu’il pouvait aussi se passer autre chose sur la planète. Tout cela était tellement déprimant que Nicolas de Latour avait coupé le son.
Il parcourait machinalement la tablette numérique où s’affichaient les titres tout aussi désolants des grands journaux en ligne, qui se succédaient depuis trois jours.
-Lucas Zarkos congédie son gouvernement et dissout l’assemblée nationale. De nouvelles élections législatives devraient avoir lieu dans un mois.
-Le Premier ministre Frédéric Follin et plusieurs ministres arrêtés pour haute trahison.
-Cédric Dubois, directeur de cabinet de Lucas Zarkos, est chargé de former un nouveau gouvernement.
-Le parti majoritaire sous le choc, après l’annonce de l’arrestation de ses deux principaux leaders, impliqués d’après l’Elysée dans l’affaire Fantômarx-WBEC.
-Romain Pinsk échappe de peu au coup de filet d’hier.
-La gauche française, prise à contrepied par la nouvelle politique économique du Chef de l’Etat, entend se mettre en ordre de bataille pour les prochaines élections.
-Simon Dassel, PDG de la première firme aéronautique française, s’en prend violemment à Lucas Zarkos : « C’est Fantômarx au pouvoir ! »
-Simon Dassel arrêté pour haute trahison. Son empire industriel et médiatique est placé sous tutelle publique.
-Romain Pinsk toujours en cavale.
-Vive inquiétude des marchés financiers après le virage dirigiste et étatiste de la France.
-La commission européenne rappelle à la France ses engagements économiques et exprime sa « profonde préoccupation » quant à la dérive autoritaire prise par l’Elysée.
-Le directeur de la BCE lance un pavé dans la mare : « Lucas Zarkos nous montre la bonne voie. Il faut réformer radicalement la politique monétaire européenne, favoriser le travail et non le capital. »
-Les bourses européennes et américaines se stabilisent après un chute brutale.
-La cote de popularité de Lucas Zarkos remonte en flèche dans l’opinion française et mondiale.
-Le président vénézuélien Hugo Chavez félicite Lucas Zarkos pour son immense courage : « la France redevient le pays de la Révolution, un espoir et un modèle pour les peuples du Monde entier ! »
-Stupeur sur les marchés financiers : à la suite de Standard and Riches, les agences de notation maintiennent la note AAA de la France.
-Nicolas de Latour déclare : « Le développement social doit primer sur le profit immédiat. Les richesses accumulées doivent profiter au plus grand nombre. »

Nicolas de Latour se sentait pris de nausée. Quelle merde ! Mais quelle merde ! Il avait certes déjà tenu des propos vaguement sociaux, histoire de polir son image, notamment avec sa fondation pour handicapés. Là, hélas, c’était bien différent. Le manipulateur était ravalé au rang de marionnette.
Il quitta son bureau high-tech pour aller ouvrir une petite armoire encastrée dans l’un des murs. De Latour en sortit une bouteille de whisky étiqueté à son nom. Du pur malt venu de l’île de Skye, élaboré spécialement pour lui moyennant un prix hallucinant. Il s’en servit une bonne rasade dans un verre en cristal, mais ne tira aucun plaisir à sa dégustation. Le goût de tourbe lui parut même infect. Marrant comme le psyschisme peut influer sur n’importe quoi. Marrant, tu parles…Une sonnerie mélodieuse, remixage du Printemps de Vivaldi, l’arracha à ses sombres pensées. Cette ligne de téléphone était une ligne directe, réservée à ses proches et à ses plus influentes relations de par le monde. Une vingtaine de personnes tout au plus en avaient le numéro.
« Nicolas de Latour…
-Nicolas, c’est Romain.
De Latour faillit s’en étouffer, et reposa brutalement son verre sur le bureau. Quelques gouttes du coûteux breuvage giclèrent sur son costume de marque italienne. Il avait reconnu la voix de Romain Pinsk, le « conseiller des puissants », traqué par la police française pour sa prétendue implication dans l’affaire Fantômarx.
-Romain ? Mais où es-tu ?
-Il vaut mieux que tu n’en saches rien.
-Mais dis-moi, quelle est cette histoire de fous ? Tu n’as pas…
Pinsk le coupa avec impatience :
-Non, bien sûr, tout ça est un ignoble coup monté ! Toutes les pseudo-preuves exhibées à la télé, tirées des « archives » informatiques de la WBEC, tous ces trucs sont bidons !
-C’est dingue ! C’est dingue !
-Ce qui est encore plus dingue, c’est ce que toi et tes collègues des agences de notation avez fait ! Il faut prendre ce salopard de Zarkos par les couilles, nom de Dieu ! pourquoi lui avoir accordé le « triple A » ? Sa politique délirante est en train de mettre le feu à la planète, et tout ce qui compte de gens sérieux semble capituler. Même Claude Chétrit, à Francfort, lui donne raison !
Il y eut un silence, troublé par la respiration légèrement sifflante d’un homme aux abois. De Latour se racla la gorge.
-Nicolas ?
-Je…je suis désolé, Romain, je n’avais pas le choix.
-Comment ça, pas le choix ? Mais toi et tes potes, vous faites ce que vous voulez !
-Justement non. Plus maintenant. Nos ordres viennent d’ailleurs. Il y a un pilote dans l’avion, maintenant, et ce n’est pas…ce n’est plus nous.
-Mais bon Dieu, explique toi !
-Je ne peux pas t’en dire plus, Romain…il faut que je te laisse. Bonne chance, mon vieux.
Nicolas De Latour raccrocha d’un geste sec. Il resta longtemps à fixer l’appareil, s’attendant à ce que Romain Pinsk le rappelle. Mais c’était peu probable, car un homme en fuite, même appelant d’une cabine téléphonique, n’avait pas intérêt à s’attarder au bout du fil.
Il sursauta quand même lorsque Vivaldi remit le couvert, et décrocha d’une main hésitante :
-Monsieur de Latour ?
Cette voix ! Cette voix métallique si désagréablement familière !
-Tout va comme vous voulez ?
-Je…j’ai fait tout ce que vous m’avez demandé jusqu’ici. Alors je ne peux pas dire que ça va, non.
Il y eut un rire sardonique.
-Je m’en doute, cher Monsieur, je m’en doute…Mais venons-en au fait. La prochaine fois que cette crapule de Pinsk vous contactera, je vous saurais gré de bien vouloir le tenir un peu plus longtemps au bout du fil. Mes techniciens étaient à deux doigts de repérer l’origine de son appel. C’est bien compris ?
-Je ne sais pas si…
-Latour, prends garde ! Avec moi, il n’y a pas de « mais » ou de « je ne sais pas ». Veux-tu que de fâcheux accidents se reproduisent ? A l’heure qu’il est, ta fille dort profondément dans son pensionnat helvétique. Il suffirait de si peu de choses pour que…
Nicolas de Latour s’épongea le front.
-D’accord, d’accord ! S’il rappelle, je ferai ce que vous dites !
-Très bien. Finissez votre whisky, et bonne soirée.
Nicolas de Latour se recroquevilla dans son fauteuil, tremblant de tous ses membres. Ce salopard contrôlait décidément tout.

*
André Delpeyrat, qui avait été dans une autre vie, incroyablement lointaine, un jeune et beau journaliste du nom de Jean-Marie Fondar, se réveilla à nouveau. Un cri perçant avait déchiré la brume de son trop fragile sommeil.
Il se dressa d’un coup sur son séant, faisant grincer les ressorts rouillés du sommier et grogner son compagnon de cellule qui frappa contre le mur, à l’étage en-dessous du lit superposé.
« Tu fais chier, oh, hein… »
Et le gars de replonger aussitôt dans les bras de Morphée, comme en témoignèrent bientôt ses ronflements sonores.
D’autres cris déchirèrent le silence nocturne. Un pauvre type, quelque part, se faisait défoncer le cul. André-Jean-Marie promena un regard brouillé sur le décor sordide de sa cellule. La violente lumière des lampadaires extérieurs l’éclairait presque comme en plein jour malgré l’étroitesse de la fenêtre à barreaux. Il ne s’y faisait toujours pas, pas plus qu’à cette odeur répugnante mêlant le chou, la pisse et les produits ménagers, ou aux piqûres des punaises de lit. Mais pour l’instant, il avait échappé à ce que le malheureux, quelque part dans une autre geôle de Meury-Flérogis, était en train de subir. Des menaces de mort, par contre, en pagaille…
« Salopard, on va te crever ! »
« On va te faire ce que tu as fait à cette pauvre fille, ordure ! »
Bousculades et injures lors des promenades s’étaient accumulées à tel point qu’André Delpeyrat, assassin présumé de Bérénice de Castelbougeac, avait été transféré dans un quartier spécial de la prison, réservé aux cas « sensibles », comme ce tueur en série qui partageait sa cellule en attente, comme lui, de son procès. Un certain Tony Colin, un grand mulâtre aux cheveux décolorés.
« Toi, c’est les journalistes, moi c’est les vieilles dames, avait-il commenté sobrement lorsqu’ils avaient fait les présentations.
-Mais je n’ai tué personne !
-Evidemment, avait gloussé l’autre. C’est ce que je disais, moi aussi. Mais mon avocat m’a conseillé de changer de tactique. Il te suggère quoi, ton baveux ?
-Plaider coupable. La folie passagère. Et le fait que la victime m’aurait manipulé pour satisfaire ses tendances vicelardes.
-Ben tiens ! Pareil pour le mien ! Il s’appelle comment ?
-Maître Vergeard.
-Le mien, c’est Collès. Une pointure aussi. On est des célébrités, mon vieux ! Allez, on s’en grille une ?
Tony Colin était certainement un monstre, mais un compagnon de détention fort convenable. Poli, partageant volontiers ce qu’il pouvait cantiner, et capable de discuter d’un peu de tout. Il s’était découvert une passion pour la littérature grâce à la bibliothèque de la prison, dévorant les œuvres de Céline et de Zola, sans oublier la Bible.
« Pas le même genre, mais j’aime bien ! »
En tout cas, l’enfermement ne l’avait pas encore transformé en homosexuel agressif.
-Avec moi tu crains rien, mon pote. Y’a que les vieilles qui me font bander. Et crois moi, elles attendent que ça, les salopes !
-Tu peux changer de disque ?
-Ok, ok…pas de lézard. C’est vrai que toi, t’es innocent !
Et il éclatait de rire.

*
Au cours de la même nuit, Nanard le clodo fut réveillé par les grognements de son chien. Sa tente igloo rapiécée lui offrait un refuge relatif contre les courants d’air glacés qui s’engouffraient sous le Pont Neuf, aussi n’était-il guère enthousiaste à l’idée de mettre le nez dehors.
« Hé, Mickey, ça va pas, non ? Déjà qu’j’ai eu du mal à m’endormir…
La solitude lui pesait terriblement depuis que ses amis André et Zézette l’avaient lâché. Il avait été horrifié d’apprendre, par la télé d’un bar où il sirotait un café, ce que le couple avait commis. Les regards lourds de reproche et d’amalgame que lui jetaient les passants depuis cet abominable fait divers semblaient tous contenir le même message :
« SDF=poivrot=assassin=faut éliminer ces gens-là. »
De fait, il lui paraissait évident que cette élimination était en cours. Cela faisait bien une semaine que Nanard n’avait plus croisé le moindre de ses semblables, du moins les isolés ou ceux vivant en petits groupes. Le « camp » du Pont des Arts était désert, les déchets nettoyés par la municipalité. On lui avait dit que les banlieues, elles aussi, se vidaient de leurs clochards.
Tendant l’oreille, Nanard percevait un bruit de moteur tournant au ralenti, et des phares vinrent illuminer les parois de la tente encombrée d’objets hétéroclites. Des pas sur le pavé, des murmures à voix basse. Il essaya de se rassurer. Des caritatifs en maraude, certainement, Secours catholique ou populaire. C’était la saison pour eux, et ils devaient avoir du temps libre avec tous ces « clients » en moins. Pas les flics, non, z’auraient été moins discrets.
Nanard consulta sa toquante aux chiffres luminescents, une grosse montre de gosse à l’effigie de Shrek dégotée dans une poubelle. Trois heures du mat’. C’était pas l’heure des maraudes, pas l’heure du tout.
Nanard sentit un frisson glacé lui parcourir l’échine, tandis que celle de son chien se hérissait, parfaitement visible en ombre chinoise sur la toile de tente éclairée. Mickey grondait de plus belle. Nanard eut aussitôt en tête l’un de ces nombreux autres faits divers, de ceux qui n’indignant pas trop longtemps les gens honnêtes, ces histoires de clodos massacrés par des jeunes en vadrouille, ou par leurs semblables de la rue. La dernière hypothèse était à exclure : les pareils de Nanard ne se promenaient pas en camionnette. Les flics, peut-être…un moindre mal. Mais le chien ne grognait pas comme ça avec eux.
Une immense silhouette, déformée par les phares du véhicule, vint se dessiner sur sa tente. On gratta légèrement la toile :
« Camarade, n’aies pas peur ! Nous sommes les Robins des Bois. Il est temps de quitter ta misère pour nous rejoindre…une vie nouvelle t’attend, camarade.
-Je…j’veux pas d’vot’ vie nouvelle. Foutez moi la paix. J’veux dormir tranquille.
-Tu l’auras voulu, camarade. »
Nanard perçut un léger sifflement, puis plongea dans les ténèbres.

*
Vers huit heures ce matin-là, les deux codétenus regardaient les infos sur leur petite télé fixée au mur. André-Jean-Marie frissonnait de fatigue après sa mauvaise nuit. Il grattait de temps à autre ses bras picorés par les punaises.
« Tant qu’elles ne nous bouffent pas les couilles ! gloussa Tony en se resservant une tasse de Ricoré.
A l’écran, Lucas Zarkos répondait aux questions bien peu agressives d’une journaliste de FT1.
« Ne craignez-vous pas, M. le Président, que l’annonce, hier, de l’annulation de votre voyage au Vatican, ne froisse les catholiques français ?
Zarkos eut ce petit ricanement silencieux et ce mouvement de tête qui n’appartenaient qu’à lui. Il joignit ses doigts et accentua l’accent circonflexe de ses sourcils en une mine faussement épiscopale :
-Le Très Saint Père et ses ouailles me pardonneront, si je préfère consacrer mon temps aux problèmes immédiats des Français plutôt qu’à le perdre dans des génuflexions hypocrites. Je crois faire la preuve de mes vertus chrétiennes en réduisant mon salaire de 80%.
-Mais…cela annule l’augmentation que…que vous…
-Que je m’étais accordée en arrivant au pouvoir, oui. Les épreuves envoyées par le ciel ont dessillé mes yeux, tel Saint Paul sur le chemin de Damas ! Heureux les pauvres, ils seront les premiers au royaume des Cieux, et il est plus difficile à un riche d’entrer au royaume de mon Père, qu’à un chameau de passer par le chas d’une aiguille…[ il pouffe] Vous voyez que je connais mes classiques !
« Il est vraiment fort, cet enfoiré ! s’exclama Tony. Il commence à me plaire !
-Et qu’en est-il de cette rumeur selon laquelle vous renonceriez à présider le G20 qui doit se réunir en février à Londres ?
-C’est pas faux, mais pas exact non plus. D’abord, je ne renonce pas à présider le G20, mais je refuse de le faire à Londres, l’un des temples de cette finance mondialisée que j’exècre. Je vais donc proposer à mes homologues de reporter ce sommet au mois d’avril prochain, à Malte. Cela me laissera le temps de préparer tout ça…je vous promets que pour une fois, ce genre de truc va servir à autre chose qu’à bouffer l’argent du contribuable !
« Il me plaît, le petit, il me plaît ! rugit Tony.
-Laisse-moi écouter, grogna André-Jean-Marie.
« On peut aussi supposer que vous voulez d’abord franchir l’obstacle des législatives anticipées qui doivent avoir lieu le mois prochain. Sur quelle majorité comptez-vous vous appuyer ? Le PMU, à de rares exceptions près, ne vous soutiendra pas, et la gauche ne paraît pas convaincue par votre changement radical de politique.
-Je ne compte pas sur elle, et surtout pas sur le Parti Social-démocrate, qui rougit toujours dans l’opposition pour mieux faire le jeu du capitalisme et des technocrates bruxellois une fois au pouvoir ! Il faut balayer la table encombrée par les mêmes vieilles équipes ! Le PRP constituera le noyau dur de la nouvelle majorité.
-Le PRP ?
-Oui. Le Parti du Renouveau Populaire.
-Mais…c’est un micro-parti créé il y a à peine un mois par votre nouveau Premier Ministre, à l’époque où il venait d’intégrer votre cabinet. Il aurait à peine 2000 adhérents !
-Vous vous trompez, madame. Aux dernières nouvelles, ils seraient près de 20 000. Les militants affluent de toutes parts. Et ce parti disposera du même temps de parole télévisé que les autres de ce fait, et des mêmes moyens de campagne, conformément à la Constitution modifiée de 2008. Celle-ci, je vous le rappelle, attribue la moitié des sièges de l’assemblée nationale à la formation arrivée en tête au 1er tour, et répartit le reste à la proportionnelle entre tous les partis en lice. Sachant que, d’après les derniers sondages, plus de 60% des Français approuvent résolument ma politique, permettez que je sois optimiste ! »
« Bien joué, bien joué ! approuva Tony Colin.
-Ouais, ouais, bien joué, grommela André-Jean-Marie. Sacré virage sur l’aile quand même ! Tu ne trouves pas ça bizarre ?
-Bah, y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ! A moins qu’un sosie ait pris sa place !
L’ancien journaliste se gratta la tête. Il commençait à avoir sa petite idée sur la tournure des choses, et ça ne l’enchantait pas du tout.

A SUIVRE…

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